Publié le 18 juillet 2023 Mis à jour le 20 juillet 2023
Pour soutenir la jeune recherche et encourager la diffusion des connaissances dans le domaine du genre et des sexualités, l’Institut du Genre a créé en 2019 un Prix de master, ouvert à toutes les disciplines. Le prix s’adresse aux étudiant·es ayant soutenu leur Master 2 dans un établissement partenaire de l’Institut du Genre. Voici les 4 masterant.e.s de Lyon 2 ayant candidaté en 2023, félicitation à eux.elles pour leurs travaux !

 
Emma Celerier
Emma Célerier
« Retrouver l’utopie » : La redéfinition du genre de l’épopée dans les récits d’anticipations féministes de Françoise d’Eaubonne,
Monique Wittig, Wendy Delorme et Antoinette Rychner.

Sous la direction de Yannick Chevalier et Marie-Pierre Harder
Ce travail de recherche propose d’analyser comment le langage est-il réinventé par les autorices féministes de façon à imaginer de nouveaux mondes. Un langage qui serait propre aux femmes et minorisæ de genre, non pas en tant que naturellement différent·e·s des hommes cisgenres mais dans un rapport au monde différent, du fait de leur position d’altérité par rapport au masculin-universel.

Il se base sur l’analyse de quatre oeuvres qui proposent des récits de « mondes d’après » : Après le monde d’Antoinette Rychner (2020), Viendra le temps du feu de Wendy Delorme (2021), Les Bergères de l’apocalypse de Françoise d’Eaubonne (1975) et Les Guérillères de Monique Wittig (1969). Bien qu’elles aient été créées dans des contextes différents – le moment-charnière des années 1970, pour Wittig et d’Eaubonne ; l’époque hyper-contemporaine, pour Rychner et Delorme –, les points communs de ces oeuvres sont multiples : ce sont des récits d’anticipation, qui partagent des valeurs similaires, ont des visées écoféministes/queer, sont polyphoniques, ouverts et intègrent des discours critiques sur leur propre positionnement et ses limites. Les autrices ont également fait le choix, a priori paradoxal, de revenir à un genre littéraire fondateur : celui de l’épopée. Il est le plus vieux qui soit, le plus guerrier et en somme, le plus patriarcal. Pourquoi les autrices se sont-elles orientées vers ce genre qui appartient au passé pour écrire de nouveaux futurs ?

En entamant le voyage vers les racines mêmes de la littérature, elles cherchent à comprendre comment des outils a priori anodins, comme les mots, ont pu devenir des armes. Elles s’affrontent ainsi diversement à l’affirmation d’Audre Lorde selon laquelle « les outils du Maître ne détruiront jamais la maison du Maître ». Quelles distances prennent-elles avec cet « outil » littéraire de façon à pouvoir l’utiliser pour détruire la « maison du maître » ? Et, quand bien même elles écrivent depuis la maison, quelles possibilités offrent cet outil pour en ouvrir de nouvelles fenêtres sur le monde ? L’épopée réinventée, féministe, devient alors un outil utopique. Les personnages dépeints ne sont pas des héro·ïne·s et ne souhaitent pas le devenir. Iels se situent dans les marges et nous invitent à les rejoindre. Les mondes présents dans le corpus sont hostiles - guerres, effondrements, état totalitaire - pourtant ils ne sont pas les sujets principaux, également inscrits dans le quotidien et l’intimité. Les autrices nous livrent ainsi une vision sensible du monde : qu’est-ce qu’un effondrement de tout ce que l’on connaît peut provoquer dans les corps ? Quelles émotions surgissent ? Et quelles en sont les conséquences sur le vivre ensemble ?

L’important ici est d’être ensemble et de faire groupe. De fait, les voix des romans ont la particularité d’être multiples, formant de véritables chorales. À travers ces chants transgénérationnels, traversant les temps et les espaces, sont ressuscitées des figures effacées de l’Histoire officielle. Alors, les textes se font recueil d’autorices et pens(h)eur·euse·s, aussi bien réel·le·s qu’imaginaires. L’impulsion utopique émerge de ce processus d’entremêlement des voix. Elle surgit du c(h)oeur. Ainsi le groupe appelle-t-il chaque personne à témoigner, pour être célébræ, chaque point de vue étant unique et permettant à l’ensemble de réfléchir à comment ne pas rejouer de précédents mécanismes d’oppressions dans ces mondes nouveaux. La fiction devient donc un espace d’expérimentation, où s’invente, par exemple, de nouvelles formes de justices, qui sortent d’un cadre punitif et carcéral et prennent en compte l’intersectionnalité des positions pour viser à une amélioration, à l’ouverture de fenêtres et non à la clôture de cachots. La question de la transmission est également posée, entre adultes ou avec des enfants, autour de nouveaux systèmes éducatifs. Transmettre ces expériences permet aux suivant·e·s d’élargir, de remettre en question et de réactualiser les savoirs hérités, et vice versa, dans un mouvement continu - le but étant de tisser un réseau, un rhizome, entre humain·e·s mais aussi avec le reste du vivant.

La langue, élément puissant de contrôle, est donc renverser radicalement. Cela passe par des expérimentations de pronoms, de focalisations et de cadres spatiotemporels déconstruits. La cohérence et la stabilité ne sont pas les enjeux, l’élan étant du côté du mouvement. En inventant des espaces-temps aux contours flous, malléables et poreux les autrices peuvent alors voyager à travers le temps et ainsi retrouver des Histoires effacées pour écrire de nouveaux futurs.
 
 
Zoé Poli
Zoé Poli
Devenir auxiliaire de puériculture, étude sur la formation des professionnelles de la petite enfance à l’école de Bron, 1948-1996

Sous la direction de Marianne Thivend 
La formation des auxiliaires de puériculture, à Bron, dans la deuxième moitié du 20e siècle, constitue le sujet de ma recherche de master, dirigée par Mathilde Rossigneux-Méheust. Aujourd’hui, 90% des métiers de la petite enfance sont occupés par des femmes et 92% des 60 000 auxiliaires de puériculture diplômées en 2002 sont des femmes. A partir d’une monographie de l’Ecole de Bron, entre 1948 et 1996, ce mémoire éclaire la construction historique du métier d’auxiliaire de puériculture, métier peu considéré, précaire et largement occupé par des femmes, comme la majorité des métiers de care, définis par Pascale Molinier comme  « des activités spécialisées où le souci des autres est explicitement au centre (…), l’ensemble des activités domestiques réalisées au sein de la famille et leur délégation à des nourrices, des gardes d’enfants, des femmes de ménage (…)». Le caractère presque exclusivement féminin de cette profession soulève des questions sur l’éducation, l’orientation et la formation professionnelle des filles et des femmes. Plus précisément, il s’agit de restituer la construction d’une morale professionnelle fondée sur la vocation, le dévouement, la discrétion et l’investissement total dans la profession en étudiant ces qualités, comportements et compétences à travers le prisme du genre et en prenant appui sur la sociologie du care.  

L’exceptionnelle conservation du fonds de l’école de Bron aux Archives départementales du Rhône a rendu ce travail possible. La constitution d’une base de données a donné lieu à une analyse quantitative des dossiers d’élèves. A partir des 3782 dossiers d’élèves, j’ai construit cette base en sélectionnant 322 dossiers par coupe soit une promotion d’élève par décennie. Parmi les documents conservés dans les dossiers, des fiches individuelles de renseignements, des copies d’examen, des questionnaires et des comptes rendus de motivation ainsi que des carnets de stages permettent de faire l’histoire des élèves « par le bas » et d’analyser les discours sur la formation, de l’admission à l’obtention du diplôme. Des questionnaires de débouchés tirés d’une enquête dans les années 1980 et 1990 donnent à voir le devenir des élèves à l’issue de leur formation.  Par ailleurs, pour saisir les représentations du métier, la revue d’orientation « Avenirs », publiée par le Bureau universitaire des statistiques, a été une source précieuse, notamment les numéros spéciaux consacrés aux « carrières féminines ». A travers l’analyse de la revue « Les cahiers de la puéricultrice », publiée par l’Association nationale des puéricultrices diplômées d’état à partir de 1964 et du manuel «  Cours de puériculture », publié par le docteur Georgette Labeaume en 1933, ouvrages commandés par le directeur de l’école de Bron en 1977, l’analyse des discours des professionnelles a pu être effectuée. 

L’exploitation des archives et le croisement des différentes sources nous ont permis de saisir le profil sociologique des élèves. Il s’agit de femmes jeunes ou adultes, entre 17 et 45 ans et majoritairement issues des classes populaires ouvrières. L’immense majorité est diplômée du Certificat d’études primaires et une part de plus en plus importante est diplômée de l’enseignement primaire supérieur puis du secondaire, à partir des années 1970, en lien avec les réformes de l’éducation. Une majorité d’élèves a effectué d’autres formations professionnalisantes, en arts ménager ou en service à la personne et un grand nombre d’entre elles a déjà travaillé auprès d’enfants. L’analyse des profils des élèves révèlent des cas particuliers comme celui des pupilles ou celui des reconversions professionnelles.

Si la vocation, l’amour des enfants et l’esprit de sacrifice et de dévouement ne sont pas les uniques motivations des élèves, ils ne disparaissent pas avec la professionnalisation du métier. Les enseignements théoriques autour de la morale professionnelle ou de la relation entre l’auxiliaire de puériculture et l’enfant confortent les dispositions des élèves vis-à-vis des métiers de care et les complètent. Ainsi, le dévouement, la conscience professionnelle, la discrétion et la tendresse sont présentées aux élèves comme les qualités essentielles à l’exercice de leur profession future.

La majorité des élèves formées dans les années 1980 et 1990 trouve un emploi après leur formation. Si elles ne sont pas toutes employées en qualité d’auxiliaire de puériculture, elles occupent un emploi de care pour la plus grande partie d’entre elles, comme aides-soignantes par exemple. Néanmoins, l’étude des débouchés des anciennes élèves pose la question des conditions dans lesquelles elles sont employées et invite à ouvrir cette recherche sur les liens entre formation professionnelle et exercice des professions de care.
 

Edon
Rémy Edon

Au Centre des Luttes. Étude des conflits intercommunautaires au Centre LGBTI+ de Lyon 

Sous la direction de CLEUZIOU Juliette, DURIEZ Tiphaine, ROSTAING Corinne
Le 15 juin 2019 au matin, le Centre LGBTI+ de Lyon est retrouvé vandalisé par un collectif se revendiquant queer. Le Centre est une fédération d’une quarantaine d’associations, mais deux sont particulièrement impliquées dans l’affrontement qui s’exprime alors : une association gay, d’une part, et une association trans, de l’autre. Le Centre est en effet depuis
quelques années le terrain d’affrontements politiques et idéologiques entre des militances traditionnelles gays, taxées de dominantes, et des associations lesbiennes et trans en particulier, parfois anciennes, certaines émergentes, qui réclament plus de visibilité.

Cet événement, qui constitue le point de départ de ce travail de recherche, n’est pas isolé : il est révélateur d’un mouvement de fond qui traverse la militance LGBTI+, tant à Lyon que sur l’ensemble du territoire français, voire européen. Le sigle générique LGBTI+, qui tend à oblitérer la grande variété des groupes qui s’en réclament, est aujourd’hui composé de militances de plus en plus difficile à « tenir » ensemble au vu des évolutions qui les traversent.
Ce mémoire se propose de décrypter, d’une part, la généalogie des tensions qui ont mené à l’annulation pure et simple de la Marche des fiertés lyonnaise en 2019 et, qui depuis, obligent le Centre à se restructurer en profondeur ; et, d’autre part, propose une étude de cas locale d’un processus largement visible aux niveaux national, mais aussi européen et américain, à savoir la division des militances LGBTI+ et la reformulation des alliances internes.

Ce travail s’appuie sur un travail ethnographique mené pendant trois années (2019- 2022), fondé sur une méthode inductive d’immersion sur le terrain en tant qu’étudiant ethnologue, militant gay, stagiaire et bénévole pour la permanence d’accueil et d’écoute du Centre LGBTI+ et siégeant à diverses reprises dans les Conseils d’Administration et les Assemblées Générales du Centre. À travers des observations et des entretiens avec des membres et anciens membres du Centre, il reconstitue les évolutions et les débats qui ont présidé à la création du Centre et à sa composition actuelle. Cette reconstitution s’appuie également sur les archives administratives du Centre depuis sa création en 2015, ainsi que sur la presse locale LGBTI+ des deux dernières décennies. La diversité des procédés méthodologiques, et leur complémentarité, a permis de rendre compte de la cohabitation et de l’évolution au sein du Centre de deux idéologies militantes qui semblent de moins en moins en capacité à se côtoyer.

D’une part, il existe un modèle « gay », proche d’une perspective universaliste de lutte pour l’égalité des droits, avec un accent fort mis sur les thématiques liées à l’homophobie, au VIH, mais qui n’est pas sensible aux questionnements sur les identités de genre et sur la dénonciation de l’hétéronormativité qui constituent, par ailleurs, la base du modèle « queer », porté par les associations lesbiennes et trans. En outre, la militance gay à la tête du centre est proche de personnalités politiques bien implantées localement et soutenant ses activités, tandis que la tendance queer se situe aux marges politiques, dans une position contestataire, et en même temps attentive à l’inclusion des causes minoritaires, dont elle appelle la convergence (anti-racistes, anti-validistes, etc.) Ces oppositions recouvrent partiellement des divergences générationnelles, puisque les personnes de plus de quarante ans sont davantage représentées dans le premier mouvement de militance, à l’inverse du second.

Ces oppositions idéologiques, générationnelles et politiques ont débouché sur de véritables stratégies d’accès au pouvoir et d’évincement de l’adversaire, allant de la stratégie du « noyautage » à celle de la démission, en passant par l’usage d’accusations interposées via les médias sociaux et la presse locale, des menaces physiques et des formes de harcèlements psychologiques. La violence de ces rivalités se trouve en outre exacerbée par les dénonciations d’agressions perpétrés au sein du Centre, qui jusqu’ici avaient été étouffées.

Le cas lyonnais illustre bien la montée en puissance des militances trans au cours de la dernière décennie qui, à l’instar des militances lesbiennes aux XXe siècle, entre désormais en
conflit avec le modèle de militance gay. Celle-ci perd progressivement de son hégémonie au sein de la militance LGBTI+, et se trouve de plus en plus critiquée voire marginalisée, en grande partie pour n’avoir pas suivi les luttes pour l’égalité des genres et, dans le cas lyonnais, pour avoir perpétué des pratiques racistes et une transphobes en son sein. La polarisation des militances LGBTI+ en France génère ainsi une crise sans précédent, dont les racines peuvent néanmoins être identifiées au siècle précédent : l’actuelle vague queer, portée par une nouvelle génération militante principalement trans et lesbienne, se réapproprie les luttes féministes et lesbiennes du XXe siècle. De la sorte, elle poursuit et approfondit la scission entre les associations gays et le reste du mouvement L(G)BTI+. 
Margaux Rolland
Enquête et Analyse des Processus Politiques

Sous la direction de Lilian Mathieu
 Depuis 2019, les médias et les réseaux sociaux se sont intéressés aux mouvements de « collages contre les féminicides » créés initialement dans la volonté de lutter contre les violences sexistes et sexuelles (VSS), étonnants en raison de leur apparente nouveauté dans l’espace des mouvements féministes et de leur succès. Ce mouvement est-il significatif d’une forme de reconfiguration de l’espace de la cause des femmes [Bereni, 2012], qui s’orienterait vers une « quatrième vague féministe » [Koechlin, 2019] caractérisée par la cause qu’est la lutte contre les VSS et par une pensée systémique et intersectionnelle des oppressions ? Plus largement, comment comprendre le succès du mode d’action des collages ? Qui sont les militantes qui s’engagent au sein du collectif de collages féministes de Lyon (CFL) et qu’est-ce qui dans leur parcours de vie a pu les disposer à entrer dans celui-ci ? Qu’est-ce que cette expérience militante à géométrie variable a comme conséquences en retour sur leur manière de concevoir le monde et les rapports sociaux de genre ?

L’enquête menée pour répondre à ces interrogations s’appuie sur des méthodes mixtes. Le volet qualitatif est composé d’observations participantes réalisées entre août 2021 et mars 2022 sur diverses activités (collages, manifestations, réunions, divers moments de sociabilités) et d’une dizaine d’entretiens approfondis permettant de retracer les parcours militants et de vie des enquêté·e·s. Ce matériau qualitatif central dans l’enquête a été complété par un volet quantitatif dans une perspective d’enrichissement, par l’apport de données sur les pratiques passées et présentes du collectif, qui n’auraient pu être collectées autrement. La création d’une base de données à partir des slogans collés et pris en photo depuis la création du collectif (N = 1487) a permis de qualifier de manière objectivée les pratiques du collectif (fréquence et lieu des collages ; causes défendues ; modalités d’expression de la cause), et donc de combiner une focale mésosociologique sur l’organisation militante avec une approche microsociologique qui s’intéresse aux trajectoires des colleuses féministes. Cette double approche permet de penser conjointement l’organisation et sa structure avec les militantes qui la composent et la font [Sawicki, 2003].

La première partie de ce mémoire fait une sociogenèse des CFL pour en présenter les héritages et positionnements dans l’espace de la cause des femmes, qui se reconfigure aujourd’hui à l’aune de la notion d’intersectionnalité, impliquant le rôle nouveau de la notion d’inclusivité face aux diverses discriminations (sexuelle, raciale, validiste, grossophobe, etc.) comme critère de jugement de la qualité et de la crédibilité d’un groupe militant.

Le second chapitre est consacré à l’étude sociohistorique du collage comme mode d’action. Récemment transposé dans le répertoire d’action féministe [Tilly, 1995], l’activité de collage souvent réservée aux hommes dans les organisations militantes [Bargel, 2005] en raison des risques pour les femmes dans l’espace public [Lieber, 2008] permet ici la réappropriation de l’espace public. J’établis une typologie des slogans selon leurs modalités rhétoriques et leurs objectifs (de dénonciation, d’éducation et d’expression d’un lien de solidarité entre adelphes). Travailler sur les choix de collage permet d’interroger la raison d’être apparente du collectif : changer les mentalités et pratiques en termes de rapports sociaux de genre (articulés aux autres rapports sociaux de classe, race, etc) mais aussi les actions des pouvoirs publics quant aux VSS.

La troisième partie propose une analyse processuelle de l’engagement [Filleule, 2001] aux CFL, en s’arrêtant sur les conditions d’entrée dans le collectif (dispositions et motifs), les parcours typiques d’engagement et les modalités de sortie de l’engagement. Ces parcours militants sont différenciés en raison de la possibilité d’imbrication plus ou moins grande des sphères de vie [Passy, 2005], en particulier des cercles de sociabilité et des secteurs professionnels et des positions au sein de ceux-ci.

Le dernier chapitre aborde les conséquences biographiques de l’engagement aux CFL. Les apprentissages réalisés, tant en termes de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être, forment de nouvelles dispositions que l’on peut qualifier de féministes intersectionnelles, et amène en retour les colleuses à tenter d’aligner les différentes sphères de leur vie avec leur engagement, donc à travailler (ou à renoncer, selon les cas) à changer des caractéristiques de leurs sphères professionnelle, familiale, amicale et intime. Ce mémoire montre que l’organisation militante des CFL agit paradoxalement plus sur ses membres que sur le public initialement visé (« l’extérieur ») par l’action de collage. Le changement social opère dès lors par le bas, par la socialisation des membres du groupe et la transposition de leurs apprentissages dans d’autres sphères de vie.