Publié le 11 décembre 2019 Mis à jour le 16 novembre 2023
le 15 novembre 2019

Professeur d'archéologie à l'UFR Temps et territoires et chercheur au laboratoire Archéologie et Archéométrie (ArAr), Matthieu Poux publie son premier roman, "Gaule-Orient-Express", un « Péplum spaghetti » qui devrait plaire autant aux amateur/trices de romans historiques que de thrillers.

Auteur de nombreuses publications scientifiques ou de vulgarisation consacrées à la Gaule, avant comme après la conquête romain, Matthieu Poux publie "Gaule-Orient-Express", son premier roman, aux éditions Actes Sud. À cette occasion, il revient pour nous sur les origines de celui-ci, son processus d'écriture, ses lectures...
 
Entretien avec Matthieu Poux
Comment vous est venue l'idée de l'intrigue ?

M. P. : L’idée d’écrire un roman historique ne m’est pas venue toute seule ! Il y a deux ans, j’ai été sollicité par une amie, qui travaille dans le cinéma, pour l’écriture d’un « péplum » d’un genre un peu nouveau. L’idée était de réaliser le pendant, pour la Gaule, de la fameuse série « Rome ». J’ai rapidement constaté que je n’avais pas été formé pour ça. C’est donc tout naturellement que la forme du roman s’est imposée. Il a inspiré un projet de série télévisée, qui sera soumis aux producteurs dans les semaines à venir…

Comment avez-vous travaillé ?

M. P. : De façon classique – mais nouvelle pour moi ! En partant de l’intrigue imaginée au départ, j’en ai esquissé le plan général et des fiches personnages, qui ont servi de canevas pour la rédaction… Sur le plan pratique, j’ai rédigé l’essentiel des chapitres durant l’été 2017, en marge des fouilles que je mène chaque année sur le site de Corent en Auvergne, qui a été une source d’inspiration pour certains décors du roman.

Quelles sont vos sources d'inspiration ?

M. P. : Il s’agit moins d’un roman historique que d’un thriller… sur toile de fond historique, au point que l’éditeur a envisagé un temps de le publier dans sa collection Actes Noirs. Destiné à un large public, il vise moins à « l’éduquer » qu’à le divertir. Son sous-titre – « Péplum spaghetti » – trahit ses influences : la culture populaire, le roman policier, le cinéma, la bande dessinée…

Quel.le est votre auteur/trice préféré.e ?

M. P. : Difficile de faire le tri, mes goûts sont assez éclectiques. Pour ce qui est des auteurs français, ils vont de Zola à… Michel Houellebecq en passant par Marguerite Yourcenar. En littérature étrangère, Milan Kundera, John Irving, Philip Roth et Paul Auster… Edgar P. Jacobs, Jean Giraud et Jacques Tardi pour la bande dessinée. Stanley Kubrick et David Lynch pour le cinéma… Tous ont en commun d’avoir su concilier exigence esthétique, intellectuelle, avec divertissement populaire.

Votre roman préféré ?

M. P. : Hormis les auteurs déjà cités, pour le genre dont on parle ici : Il nome della Rosa, d’Umberto Ecco.

Votre personnage préféré ?

M. P. : Un personnage encore inconnu en littérature : Lucius Munatius Plancus, le fondateur de Lyon, consul de Rome et gouverneur des Gaules. L’un des personnages les plus importants de l’Histoire romaine, à qui l’on doit l’avènement de l’Empire d’Auguste. Contrairement à nombre de ses contemporains, il est mort dans son lit à un âge canonique et a survécu aux guerres civiles grâce à ses multiples trahisons, raison pour laquelle il a été un peu méprisé par les historiens. Il sera l’acteur central de mon second roman, déjà rédigé, qui allie biographie romancée et enquête policière.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le sous-titre « Péplum spaghetti » ?

M. P. : Il fait référence à deux genres cinématographiques : le péplum et le western spaghetti. Le premier, avec ses décors en carton-pâte et ses acteurs bodybuildés, donne dans l’auto-caricature depuis longtemps. Le second a dépoussiéré le genre du western au profit d’une vision plus réaliste, plus « anthropologique » de la colonisation américaine au XIXe siècle - avec une bonne dose d’humour caustique ! C’est là l’ambition de ce roman : dépasser les clichés, dépeindre le quotidien de populations qui vivaient principalement à la campagne ; mais aussi, retranscrire la violence de l’époque, avec sa galerie de personnages peu recommandables. Elle rejoint l’une des missions principales assignées aux historiens : lutter contre l’idéalisation d’un passé auquel, à titre personnel, je n’aurais pas envie d’appartenir !

Karin Olafson va-t-elle devenir une héroïne récurrente ?

M. P. : Ce roman et le premier d’une trilogie à paraître, dont les trois volumes pourront se lire séparément. Il n’est pas prévu que Karin y fasse son apparition, mais elle se réincarnera dans d’autres personnages : une multitude de chercheur.es anonymes, travaillant toute l’année sur les chantiers d’archéologie préventive, dans des conditions extrêmement difficiles.

Qu'ajouteriez-vous pour vous présenter ?

M. P. : Une seule chose : je suis tombé à quinze ans dans la marmite de l’archéologie, où j’ai été poussé par les belles histoires véhiculées par la littérature et le cinéma. Cette passion ne m’a pas quitté depuis et c’est avec un plaisir insatiable que je m’efforce de la retransmettre, sur les bancs de la faculté… comme dans mes livres.

Gaule-Orient-Express

Un cadavre, deux enquêtes, menées à deux millénaires d’écart. Dans une bourgade de Gaule romaine, des moissonneurs butent sur un corps décapité aux doigts brûlés, gisant dans un fossé. Sur sa poitrine repose une poupée en ivoire, enroulée dans une feuille de plomb, sans tête elle aussi. L’édile du bourg, Caius Julius Sénovir, se rend sur place pour procéder aux premières constatations. Deux mille ans plus tard, dans la banlieue de Lyon, un squelette sans tête est retrouvé sous un futur parking. L’archéologue Karin Olafson est appelée sur le chantier. Un étrange hasard de l’Histoire fait de Caius et de Karin les coenquêteurs d’un même crime, commis dans un monde dévasté par la guerre, où les affairistes, les militaires et les coupeurs de tête dictent leur loi ; un monde en pleine mutation, où les derniers Gaulois n’ont d’autre choix que de se frotter aux bienfaits de la civilisation ou de se terrer dans les collines.
Le récit d’une conquête de l’Ouest avant la lettre, qui entraîne le/la lecteur/trice dans les coulisses de l’Histoire et de ses petites histoires du quotidien, pétries dans la boue séchée et les tréfonds de l’âme humaine. [sources : Actes Sud]

Informations pratiques